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Consigne
: Les chaussettes dépareillées dans la
boite à oubli.
Les
chaussettes
Une grande chaussette en laine verte,
épaisse, tricotée à la main, vient
d’arriver dans notre repaire. Tous les
regards se fixent sur elle, elle fait un
peu peur, sa carrure impressionne, au
moins du 52 à vue d’œil !
« - Qui es tu ? Interroge une ravissante
soquinette rose en cachant tant bien que
mal son trou au talon.
- Je sais pas.
- D’où tu viens ?
- J’habitais dans une botte en
caoutchouc.
- À bon, ça explique l’odeur. Tu es donc
paysanne ?
- Peu-être, j’étais souvent mouillée.
- Tu es de droite ou de gauche ? Demande
une tennisman.
- Je sais pas, des deux je crois. »
Un soupir de soulagement général se
manifeste. Cette grande escogriffe
n’essaiera pas de prendre le pouvoir,
elle a l’air toute benête.
Il y a eu plusieurs affrontements entre
les gauches et les droites, pour la
présidence, mais une chaussette de
gauche c’est mal conduit auprès d’une
jeune socquette de couleur très foncée
et très usée. Du coup pour éviter la
guerre, un accord c’est fait pour mettre
en quarantaine les coupable et pour
signer un accord de non agression
réciproque.
Pour consolider l’entente l’idée a été
de se regrouper autour d’un projet
commun. À l’unanimité sauf une voix,
(celle de la socquette agressée, qui ne
trouve toujours pas juste que l’on n’ait
pas lapidé son agresseur). Il a été
décidé de conspirer pour une évasion.
Les rôles furent distribués en fonction
de la nature de chacune.
Les bas furent d’accord pour faire une
échelle.
Les grandes tailles se proposèrent de
hisser les plus petites.
Et la grande costaude arrivée en dernier
fut chargé de soulever le couvercle.
La dernière réunion avant le grand jour
se fit entre deux lessives.
Chacune répéta ce qu’elle devrait faire.
« -Et où on va une fois sortie ?
Demandèrent les coquinettes.
- Ce sera chacun pour soi. Déclarèrent
les droites.
- J’aimerais tant retrouver ma moitié en
bon état, soupiraient les plus
nostalgiques.
- Moi je suis trop trouée, j’aurais trop
honte, j’irai me réfugier dans la niche
du chien, je l’aimais bien. Dit une
socquette de ville. »
Et chacun de faire des projets pour
l’après.
Beaucoup redoutaient de se faire
reprendre et de servir de chiffon à
cirer les chaussures, ou les meubles et
pire encore à nettoyer les moteurs de
voitures.
Mais tous étaient d’accord pour préférer
n’importe quel sort à celui de la boîte
à oubli.
Le jour « X » arriva l’évasion
commençait, quand la boîte fut victime
de secousses brutales. Elle s’ouvrit et
toutes furent projetées dans la
poubelle.
« - Qu’elle évasion cruelle, pleuraient
les occupantes.
- C’est triste, mais peut-être nous
retrouverons nous dans une décharge, ou
de pauvres malheureux comme nous
viendront nous récupérer pour nous
offrir une seconde vie, rassura la plus
âgée. »
Leur devenir reste un mystère nous les
avons perdues de vue !
Sophie Martin (16 Mai 2011)
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