Le vieux Pouvoir, bien campé derrière son bureau, s'abimant dans la lecture du Code Civil, annotait, grommelait, rayait, biffait, déchirait, frappait du poing.... Quand soudain, Gling, Gling, Gling ! la sonnette cristalline tinta, la porte s'ouvrit et dame Justice, pimpante et souriante entra dignement suivie d'une ribambelle de petits bambins qui virevoltaient autour d'elle. _ « Cela ne va pas du tout, Pouvoir. Regardez-moi ces enfants des Quartiers Bas. Depuis plusieurs semaines, ils n'ont pu aller à l'école faute de moyens. L'école du Quartier Bas est fermée, les professeurs ne sont pas nommés. Tandis que dans les Quartiers Hauts, une école toute neuve, rutilante regorge de moyens et de professeurs. Il faut que cela change! »

Pouvoir s'est dressé derrière son bureau, il cherche à en imposer à Justice en la toisant du haut de son mètre quatre-vingt.
_ « Sortez-moi d'abord ces gamins! Tonne-t-il.
 « Non, Pouvoir, répond Justice, ces enfants sont sous ma protection, ils ne sortiront qu'avec moi et quand ils auront obtenu des garanties pour leur droit à l'éducation.
 Je ne peux pas répondre sous la contrainte de ces mioches quand même !
 Il ne s'agit pas de contrainte, mais d'équité ! Un enfant est un enfant et il a le droit d'être éduqué quel que soit le statut de ses parents!
 C'est possible, mais je fais de mon mieux pour que l'ordre règne, que l'économie soit bien gérée, que la sécurité soit assurée. Il y a des priorité tout de même !
 Sans doute, Pouvoir, il y a des priorités! Mais je crois définitivement que nous n'avons pas les mêmes et pourtant il nous faut bien cohabiter!

Chantal Jacquin